La Nouvelle Revue d'Histoire : "L'histoire à l'endroit". Fondée en 2002 par Dominique Venner et dirigée par Philippe Conrad.

Une histoire exclusivement et étroitement nationale serait aujourd’hui anachronique. Est révolu le temps de la téléologie qui commandait le « récit national », mais l’amnésie générale que certains tentent de mettre en œuvre au nom d’un projet détaché des réalités n’est en rien recevable.

Éditorial et sommaire du n°81 (novembre-décembre 2015)

Éditorial et sommaire du n°81 (novembre-décembre 2015)

Histoire et identité

Les tenants de la déconstruction généralisée ont ouvert un nouveau front en affirmant que « la recherche de l’identité est contraire à l’idée même d’histoire  ». C’est du moins ce qu’affirmait ces jours derniers, à la faveur d’un entretien accordé par l’historien Patrick Boucheron, un grand quotidien du soir.

Éminent spécialiste de l’Italie médiévale, ce dernier conteste que l’on attende de l’histoire qu’elle « réassure notre identité  ». Il nous dit « ne pas croire aux formes anciennes du magistère de l’histoire » et regrette « les récits entraînants des exaltés de l’identité ». Dénonçant « la passion des continuités  », il rejette l’injonction faite, selon lui, aux historiens « de nous rassurer sur l’ancienneté, la consistance et la clôture de notre identité  ». Face à ce « poison contemporain  », il conviendrait de « refuser tout net toute compromission avec le projet idéologique qui prétend emprisonner la société dans la nostalgie d’un passé mythifié ». Contre « les apôtres de l’identité nationale » et contre « le piège identitaire  », il faudrait conjurer le danger que représente cette « théologie de l’inéluctable qui est la catastrophe qui vient »…

Ces propos s’inscrivent très clairement dans l’offensive idéologique d’envergure qui vise à remettre en cause la transmission de l’histoire traditionnelle, notamment dans sa dimension nationale, au moment où la mondialisation en cours est censée favoriser l’émergence d’une histoire « globale « ou « connectée », privilégiant la rencontre des mondes différents et valorisant échanges et influences réciproques. Ces diverses approches, aujourd’hui mises en avant, sont sans aucun doute parfaitement légitimes et permettent d’ouvrir des chantiers de recherche innovants et prometteurs mais, tout comme l’histoire quantitative en son temps, elles ne sauraient rendre compte de la diversité du monde et de la permanence des identités « nationales » qui se sont forgées au fil des siècles et ont fourni, jusqu’à preuve du contraire, le cadre le plus adéquat à l’organisation des sociétés humaines. C’est à travers l’histoire de leur pays que les hommes appréhendent le passé et se trouvent en mesure de lui donner un sens. C’est dans ce cadre singulier qu’ils peuvent se doter d’un destin collectif dépassant les individus atomisés rêvés par les champions du mondialisme libéral. On mesure ainsi l’importance de l’enjeu que représente la transmission d’une mémoire fondée sur la perception d’un patrimoine commun, celui que Marc Bloch résumait quand il évoquait, à propos de la France « le sacre de Reims et la Fête de la Fédération ».

Une histoire exclusivement et étroitement nationale serait aujourd’hui anachronique. Est révolu le temps de la téléologie qui commandait le « récit national », mais l’amnésie générale que certains tentent de mettre en œuvre au nom d’un projet détaché des réalités n’est en rien recevable. Fernand Braudel, l’historien de la longue durée, celui de la remise en cause de l’événement et du cadre national comme lieu privilégié de l’enquête historique, celui de la priorité donnée à l’histoire économique et sociale, entendait conclure son œuvre sur la rédaction d’une inattendue Identité de la France dont il ne put malheureusement réaliser que les premiers volumes…

Philippe Conrad

Courrier des lecteurs
Éditorial

Histoire et identité. Par Philippe Conrad

Actualité
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Portrait

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Découvertes
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Jeu

Godefroy de Bouillon et son temps

Dossier. Scandales financiers. Corruption politique
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  • La corruption des “grands ancêtres”. Par Philippe Conrad
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